mardi 11 novembre 2008

Allocution cérémonie de l'armistice de la première guerre mondiale, 11/11/2008

1918, 2008, 90 années, déjà, depuis la fin de la première guerre mondiale.

90 ans et je suis honoré d’être devant vous aujourd’hui pour lire avec le plus grand respect ces quelques lignes, pour saluer le courage de nos combattants engagés pour la liberté. Le 8 mai aura été la date de l’émotion, le 11 novembre sera celle du respect.

1918, 2008, 90 ans pour refuser d’oublier
. La mort du dernier poilu français, au printemps dernier, a marqué pour certains le début de la rédemption et la volonté de vouloir gommer les souvenirs de cette guerre.

Déjà le remplacement évoqué l’année dernière de la commémoration de l’armistice du 11 novembre par une journée de fraternité entre la France et l’Allemagne marque une première étape.

Les évènements survenus dans le monde et dans des pays proches démontrent la nécessité de constituer une Europe forte, bâtie sur une ossature franco-allemande et garante de la paix.

Cette volonté ne doit pas nous faire oublier pour autant la bravoure et le sacrifice de nos soldats. La fin programmée de cette cérémonie ne doit pas être l’oubli du courage.

Nous célébrons peut-être cette commémoration pour l’une des dernières fois et l’oubli arrivera avec le temps qu’on le souhaite ou non.

Alors prenons quelques minutes encore, au moment où je lis ce discours, pour écouter et se recueillir encore une fois en souvenir de ces soldats. Prenons le temps ce matin pour ne pas les oublier.


1918, 2008, 90 ans pour condamner.
Toutes les guerres doivent être condamnées car elles touchent des innocents, détruisent des familles, massacrent des peuples. Avec 20 millions de morts et 21 millions de blessés, la première guerre mondiale doit être condamnée comme l’une des pires de l’Histoire.

Je voulais également condamner de n’avoir vu que le soldat et non plus l’homme dans tant de décisions. Durant la bataille du Chemin des Dames en 1917, pour une erreur d’interprétation puis un excès d’orgueil, l’offensive française fut un échec cruel et un massacre pour les soldats engagés avec 200.000 victimes françaises en quelques semaines.

Je souhaitais condamner la pratique de l’exécution des soldats pour l’exemple. Cette procédure visant à maintenir les troupes en parfait état d’obéissance fut largement utilisée dans un souci d’exemplarité par les états-majors de différents pays impliqués dans le conflit dont la France.

Non, les poilus ne refusaient pas de se battre, ils n’étaient pas lâches mais refusaient qu’on les envoie vers une mort certaine, refusaient de combattre à outrance alors que plus de 100 hommes pouvaient mourir en une minute lors des assauts les plus sanglants.

Je condamne également l’après guerre et l’orgueil des vainqueurs. La guerre est une chose, la réconciliation en est une autre. Il faut tendre la main à ses ennemis d’hier, cela pour préparer l’avenir. Il fallait savoir ouvrir les bras pour essayer de reconstruire ensemble et unis.

Tant de choses auraient pu être différentes en faisant cela. En portant l’orgueil et la fierté comme symboles de la victoire, on se préparait simplement au pire. En rejetant l’autre, en le montrant du doigt, en l’humiliant, tout était là pour que le replis sur soi fasse son œuvre et donne naissance à l’avènement d’Hitler. Tout aurait pu être différent en regardant le peuple vaincu autrement.


1918, 2008, 90 ans pour célébrer.
Je voulais terminer en saluant le courage et le dévouement des soldats qui ont combattu pour notre pays. Cela me semble normal de terminer par cela, c’est cela que je souhaite retenir aujourd’hui.

90 ans pour se souvenir des nuits et des petits matins lorsque les soldats se réveillaient avec la peur de mourir et en sachant qu’ils allaient devoir se battre. 90 ans pour s’imaginer ce qu’ils ont pu ressentir un matin d’automne, en 1915 ou 1917, au moment de sortir de leur tranchée pour s’élancer vers l’inconnu.

Ces tranchées, la fumée, les gaz, les rats, les maladies, la faim, le froid, l’absence de leurs proches, cette guerre était terrible mais ils savaient lorsque l’ordre les faisait se lever, courir et se battre pour la France.


Après 90 ans, que vous ayez décidé de célébrer, de dénoncer ou même d’oublier cette guerre et cette date, chacun choisira ce qu’il a jugé le plus juste.

Je n’ai jamais aimé le terme de « devoir de mémoire » car la mémoire envers ceux qui ont lutté pour notre liberté ne devrait jamais en être un.

Ces enfants venus nombreux devant ce monument aux morts montrent à tous que l’important est ailleurs. En perpétuant le souvenir de ces combattants, ils continueront d’exister à jamais dans les cœurs et les mémoires des générations futures.


Ce matin, nous avons parlé de l’histoire de nos familles
car même si pour beaucoup la première guerre mondiale est désormais loin derrière eux, elle aura eu des conséquences sur notre vie à tous.

Ce matin, nous avons parlé de la mort, nous avons parlé du courage, nous avons parlé du dévouement, nous avons parlé du respect.
Des mots souvent répétés dans ma bouche mais caractérisant si bien les anciens combattants de cette guerre.

Vous vous êtes battus, vous vous êtes levés, vous avez couru dans ces champs boueux du Nord de la France, vous êtes morts pour que nous puissions être là ce matin.

En quelques secondes, vous avez fait une chose que certains essaient d’atteindre sans y arriver durant toute leur vie. Vous avez fait cette chose rare, vous avez inscrit à jamais votre nom dans l’histoire de France.

Stéphane Mirambeau
Maire de Villepreux